Le grand sujet du feedback
Le feedback on en parle régulièrement, il existe des articles sur le sujet, son utilité est reconnue et pourtant …
le feedback est très difficilement appliqué en entreprises.
Mais le feedback, qu’est-ce que c’est vraiment ?
C’est d’abord un anglicisme, difficile à traduire, comme le terme soft skills.
Feed se traduit par nourrir et back par retour : « un retour qui nourrit » ? Le feedback est un échange au sujet d’une action réalisée. Et cet échange fait grandir.
Les ennemis du feedback
Le 1er ennemi, c’est le temps, le temps de la relation à l’autre, le temps de l’échange.
Le COVID n’a pas arrangé la situation. Les collaborateurs se voient moins, les situations formelles et informelles sont moins fréquentes. On se croise moins souvent à la machine à café.
Le feedback a bien d’autres ennemis : la culture de l’entreprise, les a priori « je n’ai pas envie d’être convoqué dans le bureau de mon chef », le courage, l’individualisme « au fond c’est son problème », … ou peut-être la méconnaissance de l’intérêt du feedback.
Les bénéfices
Dès qu’il y a une volonté d’échange constructif, les situations se débloquent, on se comprend et on travaille mieux.
Le feedback apporte de l’efficacité, de la sérénité, de la productivité.
Le feedback doit être vu comme un investissement qui produit des effets dans la durée. Nous en revenons au temps. Le procès du temps est un faux procès. Un feedback peut prendre 2 minutes.
Et il n’est pas forcément nécessaire d’en faire tous les jours.
Un outil RH puissant
Les services RH investissent dans des outils d’évaluation de leurs équipes, des assessments, des « 360 ». Ces outils ont évidemment leur utilité. Mais côté coût, le feedback c’est moins cher et cela permet de s’évaluer régulièrement.
Côté RH, les bénéfices de la pratique du feedback sont nombreux :
- Le feedback nourrit le besoin de reconnaissance au travail
« 46% des DG et Managers interrogés citent le « manque de reconnaissance » comme l’un des facteurs qui peut avoir le plus d’impact négatif sur la motivation des salariés (enquête Robert Half, 2017) » - Le feedback favorise la collaboration
Il évite les non-dits et les tensions latentes. Les collaborateurs ont souvent des attentes vis-à-vis de leurs collègues, de leurs managers et vice-versa. Ces fameuses, peu ou pas exprimés, gangrènent les relations.
Personne ne peut deviner les pensées de l’autre si elles ne sont pas exprimées. Le feedback donne un cadre qui permet de se dire les choses, de clarifier les attentes des uns et des autres. - Le feedback permet de progresser
Le feedback permet de mieux connaître ses points forts. C’est essentiel pour la confiance en soi. Cela permet de prendre conscience de pratiques que l’on peut mieux faire ou que nous ne connaissons pas. Cela permet de tester de nouvelles solutions ou de nouvelles actions et donc d’exploiter notre potentiel. Cela offre un recul sur soi et sur ses actions. Moins on teste, moins on exploite nos propres ressources, moins on évolue.
Le feedback est le cadre idéal de l’amélioration continue. Les environnements et les organisations évoluent, les individus doivent évoluer dans ces environnements. Le feedback permet de vivre des ajustements en douceur et régulièrement. Il contribue au développement des collaborateurs et des entreprises. Au fond l’idée c’est que l’on progresse tous. Le feedback devrait s’appliquer de façon réciproque. Manager vers collaborateur, collaborateur vers manager et entre collègues.
Quelles sont les conditions de la pratique du feedback ?
- Trouver le bon moment
Le feedback demande de la disponibilité de la part des 2 personnes, mais aussi de la réceptivité. - Préparer son feedback
La préparation dépend à la fois de l’objectif et du sujet. Nous verrons que l’une des étapes clés du feedback repose sur la restitution de faits précis. C’est un des axes qui nécessite de la préparation. - Adopter les bons comportements (soft skills)
Rigueur
La rigueur car il faut être précis sur les faits objets du feedback.
Bienveillance
La bienveillance, qui permet l’ouverture des esprits, la volonté de partage, la volonté de sortir avec quelque chose de positif. La bienveillance, ce n’est pas l’attitude de « tout le monde est gentil » la bienveillance n’implique pas la complaisance. Elle passe par le choix des mots, des expressions positives, le regard, le ton.
Prise de recul
La prise de recul pour analyser la situation et ses impacts, et réfléchir à la façon dont vous aller aborder votre interlocuteur.
Assertivité
L’assertivité pour prendre position sur un sujet, dans le respect de sa propre personne et dans celui des autres.
Audace
L’audace d’intervenir. C’est facile quand la situation est positive, c’est plus difficile quand nous souhaitons faire un feedback constructif à partir d’une action que l’on évalue comme non satisfaisante. Le courage, c’est aussi accueillir les réactions de son interlocuteur.
Écoute
L’écoute car c’est un moment d’échange, de partage de perceptions. Cela exige aussi d’avoir envie d’écouter, de comprendre sincèrement les raisons qui ont amené votre interlocuteur à agir.
1. Le feedback 100% positif
A consommer sans modération ! Au fond, on n’en fait jamais assez. Votre collègue, collaborateur, manager a réalisé une action qui vous a marquée de façon positive.
Pourquoi ne pas lui dire, qu’est-ce que cela coûte ?
La clé c’est de donner un feedback factuel. C’est sympa de dire « j’ai bien aimé ton intervention »
mais ce n’est pas assez impactant. Que reste-t-il de cet échange ?
Rappelons que le feedback apporte de la reconnaissance, du développement personnel, dans
une dynamique d’amélioration continue. L’impact du feedback vient de sa précision.
• Qu’est-ce qui vous a plu concrètement ?
• Qu’avez-vous réellement entendu, observé, lu ?
On entend trop souvent des phrases de types « je ne sais pas trop, c’est mon impression, c’est mon ressenti ». Et bien réfléchissez ! Votre impression, votre ressenti repose sur des faits, cela ne tombe pas du ciel.
Le feedback positif se pratique en 3 temps :
- Nommez avec précision la situation
- Dîtes en quoi vous avez apprécié ce que la personne a fait
- Laissez la personne réagir et questionnez-la pour qu’elle prenne conscience de ses forces
Les soft skills mobilisés sont principalement la prise d’initiative (ne vous freinez pas, faîte-le !) et la rigueur pour la précision des faits à restituer.
2. Le feedback de progression
Rappelons qu’un des objectifs du feedback est de rendre une situation apprenante, de clarifier les attentes, d’éviter les non-dits.
C’est un échange constructif qui permet à chacun de partager les mêmes points de repère. C’est à la fois important de partager les points positifs sur lesquels on est d’accord, mais aussi de partager les points d’amélioration pour se rapprocher progressivement.
Le feedback positif se pratique en 4 temps :
- Introduire le feedback
• Présenter l’objet et les bénéfices souhaités de l’échange - Échanger
• Faire exprimer les points positifs puis les points d’améliorations
• Procéder par questionnement pour impliquer et mesurer la perception
• Enrichir les points exprimés et rester sur une base factuelle - Choisir une ou deux actions d’amélioration
- Conclure positivement
• Mettre en évidence les bénéfices de l’échange
Il faut rester positifs tout au long de l’échange. Et surtout ne pas aller trop vite ou négliger le partage sur les points positifs. C’est grâce à cette étape que votre interlocuteur sera plus ouvert à la discussion sur les points d’amélioration. Sinon le risque c’est que votre interlocuteur se protège et soit moins à l’écoute et dans l’accueil de vos remarques. C’est normal, ce n’est jamais facile d’accepter des critiques.
S’il y a beaucoup de points d’améliorations à partager, faîtes des choix. Prenez-en un ou 2 prioritaires. Utiliser la politique des petits pas, plutôt que de vouloir tout régler d’un coup. Idéalement, si la situation le permet, c’est plutôt à la personne qui reçoit le feedback de choisir son axe d’amélioration. C’est plus motivant et ça renforce la relation de confiance. Vous arriverez progressivement à vos objectifs. Patience. Le chemin parcouru compte autant que le résultat obtenu.
Les soft skills mobilisés sont la rigueur pour la précision des faits, le climat de confiance, la bienveillance et l’écoute pour comprendre la perception de votre interlocuteur et l’assertivité car nous sommes bien dans une posture de respect et d’échange réciproque.
Exemple : Prune et Simon se retrouvent pour un feedback :
(Echanger)
(Choisir d’une action)
(Conclure positivement)
Il y a une variante à cette méthode. Si votre interlocuteur n’a pas assez de recul ou si pour une raison valable vous n’avez pas assez de temps, l’étape d’échange peut se réaliser d’une manière différente :
• Commencez par donner les faits positifs, puis,
• Posez des questions pour faire exprimer les perceptions de votre interlocuteur et faites
• pareil pour les axes d’amélioration.
Dans la pratique, cette variante est sans doute plus utilisée que celle présentée dans l’exemple. Le piège à éviter est de s’écarter d’un véritable échange, et de tomber dans les travers d’un retour descendant sans connaitre la perception de son interlocuteur.
3. Le feedback constructif avec la méthode DESC
Votre collègue, collaborateur, manager a réalisé une action qui vous a marquée de façon négative cette fois. Pourquoi ne pas lui dire ? Les risques d’une détérioration de la relation, à court, moyen et long terme terme, sont réels. Cela laisse des traces qui entraînent des répercussions sur vous, sur la personne en elle-même, sur les autres. Les tensions naissent et s’infiltrent dans la relation. Plus on attend pour réagir plus cela se complique. Choisir de réagir à froid pour analyser calmement la situation est une attitude sage, mais n’attendez pas un mois pour en parler.
Après avoir introduit l’entretien : le sujet de la discussion et votre envie de trouver une solution.
Le feedback constructif se pratique en 4 temps :
- Décrire les faits avec précision, pour ne pas être contredit
• Obtenir un accord sur les faits avant de passer à l’étape suivante - Exprimer son ressenti, pour toucher la personne et le responsabiliser
• Exprimer votre propre ressenti, ou les conséquences générées sur la personne elle-même et son entourage
• L’objectif c’est de faire le lien entre l’action commise et les conséquences de cette action pour aider votre interlocuteur à prendre conscience de ce lien - Proposer des Solutions
• Chercher ensemble des solutions - Conclure positivement
• Donner les bénéfices, ou les conséquences positives, pour les deux parties
Les soft skills mobilisés sont la rigueur et la prise de recul pour analyser son ressenti, l’audace pour oser aller vers l’autre en se concentrant sur les bénéfices attendus, l’assertivité car nous sommes dans une posture de respect, la bienveillance et l’écoute pour intégrer la perception de l’autre.
Exemple du DESC avec Nathan et Elise
(Décrire les faits)
(Exprimer son ressenti)
(Proposer des Solutions)
(Conclure positivement)
Le feedback constructif n’est pas évident, il faut le tester, s’entraîner, se tromper parfois et recommencer. En situation de tension, cela nous demande de puiser dans nos soft skills notamment l’audace et l’assertivité.
Le feedback, un cadeau
En conclusion, le feedback c’est apprendre de ses expériences grâce à un dialogue apaisé et constructif.
Prenons-le comme un cadeau, Il offre la possibilité de progresser, d’élargir notre champ de vision.
D’ailleurs, le feedback ne se limite pas à la relation entre un manager et ses collaborateurs.
Le champ du feedback est immense. Il concerne toutes les personnes qui sont prêtes à offrir un retour bienveillant et toutes les personnes qui sont prêtes à l’accepter. Au fond l’idée, c’est que tout le monde progresse.